Le rapatriement de la Constitution canadienne: «Kitchen Accord» ou la «Nuit des longs couteaux»
DENIS, Roch (Dossier constitué par). Québec : dix ans de crise constitutionnelle, Montréal, vlb éditeur, 1990, Coll. Études québ

Lettre de René Lévesque à Pierre Elliott Trudeau

S'il plaît à la Cour suprême de consacrer judiciairement cette entente nocturne signée il y a un peu plus d'un an entre les gouvernements anglophones du Canada et le vôtre, soit. Mais je dois vous informer que le Canada Bill n'en demeure pas moins foncièrement illégitime, et par conséquent absolument inacceptable aux yeux du Québec, de son gouvernement et j'en suis convaincu, de l'immense majorité des Québécois. Il sera donc impossible pour tout gouvernement digne de ce nom au Québec d'accepter une telle réduction draconienne et unilatérale des pouvoirs de notre Assemblée nationale, et de se voir imposer une formule d'amendement ne lui accordant aucune protection véritable pour l'avenir.

L'Assemblée nationale a déjà énoncé, en décembre 1981, les conditions auxquelles cette loi constitutionnelle britannique pourrait devenir acceptable. En premier lieu, la loi constitutionnelle doit reconnaître non seulement l'égalité des deux peuples fondateurs mais également le caractère distinctif de la société québécoise. En deuxième lieu, en vue d'assurer l'épanouissement de cette société, le mode d'amendement de la Constitution canadienne doit reconnaître au Québec un droit de veto général ou un droit de retrait assorti de la pleine compensation financière dans tous les cas [...]. Enfin toute charte canadienne des droits ne doit en aucune façon avoir pour effet de modifier les compétences législatives de l'Assemblée nationale, notamment en ce qui concerne la langue d'enseignement et ce qui a trait à la liberté de circulation et d'établissement.

17 décembre 1982